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Chapitre 1

Lundi

Depuis quelques temps, rien ne va plus. Il ne parvient plus à créer. Sa muse s'est enfuie. Comme si la source de son inspiration s'était tarie dans le confort de sa vie paisible de famille. Ce soir, il s'endort, désespéré.

Dans la nuit, il se réveille en sursaut, la sueur perle sur son front. Ses yeux s'illuminent... Ca y est, cette fois-ci ! Il se lève d'un bond, descend l'escalier en courant. Il manque de trébucher. Fébrile, il cherche son casque, s'assoit à son piano. Ses doigts se posent doucement sur les touches blanches. Au début, ses doigts se font timides, hésitants, lents. Puis, progressivement, mus par un mouvement automatique, ils se mettent à jouer frénétiquement. Cette musique cristalline, entêtante, envoûtante, l'emprisonne. Enthousiaste, il compose toute la nuit. Il enregistre la mélodie afin de ne pas risquer d'oublier ce qu'il a toujours voulu composer. C'est la musique de sa vie... SYBIL… Oui… C’est comme cela qu’il va l’appeler.

Sorti de sa torpeur créative, il prend conscience que le jour se lève. D’un pas précipité, il se dirige vers la cuisine. « Zut ! Je suis en retard ! ». Il ne change pourtant pas ses habitudes et prépare à la hâte le petit-déjeuner pour sa mie.
« Chérie, il m’est arrivé une chose extraordinaire, cette nuit ! Je l’ai, ça y est ! Le morceau, magnifique. Faut que j’y aille. A ce soir ! »

Encore ensommeillée, elle n’a pas réalisé. « Qu’est-ce qu’il m’a dit ? ». Ses pensées sont confuses. Elle ne se souvient que de son excitation. Son esprit n’est pas encore sorti du brouillard. Puis, progressivement, elle comprend. « C’est malin de me dire une chose pareille, comme ça, juste avant de partir. Cela va me préoccuper toute la journée. Ah ! Merci », pense-t-elle, à la fois rageuse et désabusée. Elle déjeune, contrariée et l’esprit ailleurs. D’habitude, elle apprécie de déjeuner avec Geoffroy, c’est une façon d’être ensembles avant de commencer des journées souvent trépidantes. C’est un moment savoureux, de bonheur. Le bonheur d’être juste ensemble, l’un près de l’autre, à l’abri d’une présence bienveillante…

Commence alors une journée ordinaire : amener les enfants à l’école, faire le ménage, la cuisine, les courses, prendre un peu de temps pour soi : faire ses grilles de sudoku et lire (sa passion…). Mais tout au long de la journée, son esprit est rongé par la curiosité et hanté par une seule pensée (que Geoffroy rentre et qu’il lui fasse écouter cette musique).

Mais Geoffroy ne rentre pas . 18 heures passées, que fait-il ? Inquiète, elle sent son estomac se nouer. Elle s’occupe des bains pour les enfants. Soudain, on frappe. Elle descend précipitamment. C’est Thierry, un ami. Il est le bienvenu. C’est l’évènement qui la distrait à peine de ce qui la préoccupe. Elle se dépêche de mettre les enfants en pyjama afin d’être avec Thierry. 18h45 : Geoffroy n’est toujours pas là. Pourquoi n’appelle-t-il pas ? Ce n’est pas son habitude. La peur sourde en elle. Elle propose un apéritif à Thierry et l’écoute d’une oreille distraite. Et là, enfin, la porte s’ouvre. Geoffroy apparaît, resplendissant, heureux malgré une journée dure de labeur et des heures supplémentaires.

Il salue les enfants, Thierry et s’empresse d’embrasser son épouse. Il lui prépare son cocktail préféré à base de rhum blanc, soho et jus d’ananas, coloré d’un trait de grenadine. La conversation qui suit est d’une banalité affligeante : il ne tarde à Isabelle qu’une seule chose, que Geoffroy lui parle de sa musique. Tout autre sujet est futile, sans intérêt !

Thierry s’en va. Geoffroy lui donne le CD pour qu’il écoute son chef-d’œuvre et trouve sur sa batterie un rythme qui soutiendrait et mettrait en valeur cette mélodie unique, enchanteresse… Repas en famille. Les enfants sont couchés le plus rapidement possible malgré les rituels (lecture d’une histoire, les bisous qui soufflent déposés doucement sur la main et envoyés délicatement par un souffle léger…), car le lendemain, il y a école.

Enfin seuls ! « Alors, ce morceau, je peux l’écouter ? » s’impatiente Isabelle.
« Oui, il est sur l’ordi. Viens ! »
Quelques clics et…
« Mais, il était là. C’est pas vrai ! Impossible ! »
Quelques jurons éclatent, la colère explose.
« Chéri… , ose timidement Isabelle, ce n’est pas grave, enfin si, bafouille-t-elle, tu peux le jouer puisque tu l’as composé.
- Oui, tu as raison. »

Il s’installe au piano, les mains en suspend au-dessus des touches blanches et noires. Silence religieux et profond. Quelques notes… Des soupirs agacés. Les mains tremblent… Regard hagard. Quelques notes… Sueurs froides. Stupeur : il lui est impossible de se souvenir de la mélodie…

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Table des matières

Annexes

Le soir à l'apéro...

 

 
     
     

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